Focus sur les AMAP du Nord-Pas-De-Calais
Le Ministère de l’Agriculture publiait une étude en 2012 qui révélait qu ‘ « un producteur sur cinq vend en circuit court ». Ces circuits courts, qui savent valoriser les produits, tentent ainsi d’échapper aux fourches caudines de la grande distribution (aussi appelée GMS). En effet, comment répondre aux exigences de celle-ci ( produire en quantité, de manière régulière, des produits calibrés et formatés) lorsqu’on est exploitant d’une ferme de petite taille, ou que l’on s’est converti à l’agriculture biologique ?
Un circuit court de distribution se matérialise par une absence ou un faible nombre d’intermédiaires entre producteurs et consommateurs. On peut par exemple citer la vente directe à la ferme, la vente sur les marchés, la distribution de paniers.
A l’échelle régionale, le Nord-Pas-De-Calais occupe une bonne position dans le réseau des circuits courts : on dénombre plus de 55 % d’exploitations de fruits vendant en circuit court, et plus de 25 % pour ce qui concerne la vente d’œufs et de volailles. Bien souvent complémentaires, les différentes pratiques connaissent une popularité croissante. Parmi elles, les Associations pour le Maintien d’une Agriculture Paysanne (AMAP), encore jeunes puisque nées en France en 2001, se frayent petit à petit une reconnaissance.
Nous avons cherché à comprendre les facteurs de démocratisation des AMAP dans la région NPDC, comme mode de consommation responsable et de proximité.
Il serait aisé de dresser un panégyrique des AMAP, puisqu’elles possèdent de nombreuses externalités positives, aussi bien en termes économiques, environnementaux ou éco-responsables. Tout d’abord, ce contrat constitue un débouché assuré pour les producteurs. Ainsi, Laurent Desbuisson, agriculteur amapien à La Chapelle d’Armentières (ferme de l’Aubépine), évoque la « réduction des pertes et une meilleure anticipation de la production ». Outre l’aspect économique, il insiste également sur la qualité des produits : « Ce ne sont que des produits frais ». Les paniers permettent même de sonner le grand retour des légumes dits « oubliés » : « Je suis content de me faire de la soupe de panais », nous confie un adhérent un jour de distribution.
Pour le consommateur, ces paniers sont gages de qualité, et à « 80 % labellisés en Bio », comme l’indique Rémi TOP, coordinateur du Réseau Régional des AMAP. Interrogé sur ce circuit, le Président de l’UFC Que Choisir de la Région Nord, Robert Bréhon, partage cet enthousiasme : « Même si cela n’est peut être pas la solution pour les gros agriculteurs, ce système permet au consommateur de savoir ce qu’il achète, et cela contribue aussi à réduire le gaspillage alimentaire car même si le produit est physiquement disgracieux, il sera normalement consommé. ». Outre la qualité, les AMAP ont un fort retentissement sur la création de lien social : sous les halles couvertes de La Madeleine (59), un amapien revient sur son expérience : « Ce qui me plaît, c’est qu’on crée vraiment des relations de proximité avec les producteurs, les contacts sont plus personnels ».
Les limites de l’AMAP
Pourtant, le système des AMAP connaît des limites. Le premier frein au développement des AMAP réside dans la difficulté pour les agriculteurs de trouver des terres de culture. Et même lorsqu’ils les ont trouvées, cela représente une faible part de leur chiffre d’affaires -environ 1 % du mode de commercialisation en circuit court concerne les AMAP. D’autre part, il s’agit souvent de convertir ses terres en bio, processus long et difficile malgré les aides des collectivités territoriales. Ainsi, le Nord-Pas-De-Calais est l’avant dernière région en terme de labellisation (1,3 % de la surface agricole utile). Enfin, les AMAP ont quelques externalités négatives, telles que l’émission excessive de dioxyde de carbone dans les déplacements sur les lieux de distribution. Dans une économie qui se veut collaborative, les consomm’acteurs devraient privilégier des systèmes de covoiturage pour réduire l’empreinte écologique.
A l’heure du drive, d’autres systèmes alternatifs voient le jour, venant porter ombrage aux AMAP. Ainsi, La Ruche qui dit Oui connaît un rapide essor dans la région : 33 en Nord-Pas-De-Calais. Les consommateurs commandent en ligne chaque semaine, et sont libres de choisir le contenu de leurs paniers, contrairement aux AMAP. Pour Rémi TOP, ce système repose guère sur la solidarité producteur/ consommateur. Une autre initiative a émergé en Nord-pas-De-Calais : le réseau de magasins de proximité sans centralisation d’achats O’Tera, qui permet de fédérer plusieurs producteurs autour de la valorisation des produits frais. Cette initiative laisse Laurent Desbuisson perplexe : « Même si cela reste un circuit court, cela ne crée pas les mêmes liens entre producteurs et consommateurs. ».
En attendant que l’Europe et le gouvernement prennent des mesures de défense des exploitations de petite taille, la communauté amapienne a tout de même de beaux jours devant elle : « Dans la région, les AMAP continueront à tisser du lien social entre producteurs et consommateurs, et à favoriser la biodiversité et la fertilisation des sols. D’autant que la relève est assurée par de jeunes producteurs », conclue Rémi TOP, confiant.
Par Sabine CHAILLAS
Bonjour,
Merci pour cette analyse très intéressante. En effet, les AMAP sont assez rigides pour le consommateur ce qui freine sûrement certains.
Je lance de mon côté un système un peu à la croisée des chemins dans ce domaine, une valorisation des petits producteurs régionaux gratuite et sans contrainte.
Les producteurs peuvent se faire géolocaliser et partager leur savoir-faire sur notre site, puis lorsque les gens ne peuvent pas se déplacer pour acheter à la ferme, notre système de vente en ligne des produits prend le relais.
C’est sur http://oupicorer.com si ça vous intéresse.
A bientôt
Benoît Blanchard